Des marches militantes marquent le jour des grèves de masse en France

La participation a été plus importante que la dernière fois, mais il y a de grands débats sur la suite

Les grèves de masse en France font défiler 700 000 personnes à travers Paris

La grève et les manifestations de masse en France mardi ont été un énorme succès. La question clé est de savoir ce qui va suivre.

Déjà la révolte de cette année contre l’assaut du président Emmanuel Macron sur les retraites a vu les plus grandes manifestations depuis des décennies. Le 31 janvier, selon les syndicats, 2,8 millions de personnes ont défilé.

Il est important de souligner qu’il s’agissait de plus qu’une série de promenades polies. Il s’agit d’un grand nombre de personnes revendiquant des zones entières de villes pendant quelques heures, inondant des villes, transformant des zones rurales tranquilles en centres palpitants de riposte. A Tarbes, ville de 43 000 habitants du sud-ouest, 21 000 ont participé.

Au cœur de toutes ces mobilisations se trouvent des grévistes de tous types et du secteur public comme du secteur privé. Mais il y a aussi des étudiants, des écoliers – qui ont fermé plus de 300 écoles dans tout le pays en bloquant les entrées – des retraités et des chômeurs.

Le journaliste de France 24 à Paris a noté: « Des gens de tous les secteurs et de toutes les générations se sont rendus. » Et elle a vu « des gens venant du secteur de l’éducation, du secteur pharmaceutique, de la métallurgie et aussi du secteur aéronautique ».

C’est une vague d’expression publique. Mais le gouvernement sait déjà qu’il n’a le soutien que d’une petite minorité de la population – et il s’en moque.

Le jour même de ces manifestations, les ministres faisaient passer la clause la plus ambitieuse à travers la chambre haute du parlement. C’est celui qui ajoute deux ans à l’âge auquel on peut prétendre à une retraite à taux plein. C’est un énorme assaut, mais c’est aussi le symbole d’une classe dirigeante déterminée à discipliner la classe ouvrière.

Macron espère faire face aux manifestations, faire adopter les changements par le parlement et laisser la colère refluer, peut-être après quelques maigres aumônes aux dirigeants syndicaux pour couvrir leurs retraites. Mais il fait face non seulement à des manifestations de rue, mais aussi à des grèves, par millions.

Mardi, presque tous les services ferroviaires se sont arrêtés, ainsi que la plupart des transports publics parisiens. Les syndicats ont déclaré que 60% des enseignants du pays ont quitté l’école.

Les grévistes ont bloqué les portes de toutes les raffineries du pays. Les éboueurs de Paris ont commencé leur grève lundi et les rues ont déjà commencé à s’entasser avec des centaines de tonnes d’ordures. Les travailleurs ont bloqué et fermé la zone industrielle de la ville portuaire du Havre.

Les huit fédérations syndicales ont soutenu les grèves, et certaines font du bruit pour aller plus loin. La fédération syndicale CGT a tweeté : « Ce n’est que le début de… la suite ». Mais les dirigeants syndicaux ne feront pas passer l’organisation des insurgés à la base qui serait nécessaire pour une grève de masse à durée indéterminée.

Il y a des aperçus du potentiel. A Toulouse, par exemple, 150 cheminots ont tenu leur plus grand meeting de masse depuis le début du mouvement et ont voté à l’unanimité mercredi la poursuite de la grève. Un employé de la raffinerie a déclaré : « Il n’y a pas une goutte d’essence qui sort, et ça va continuer, on va vers un arrêt de la production.

Les socialistes et les militants de base de certaines localités ont réuni des groupes tels que des enseignants, des travailleurs des transports publics, des cheminots, des étudiants et autres. C’est pour qu’ils puissent être des pionniers et des ambassadeurs d’une grève plus large, que les dirigeants syndicaux l’appellent ou non.

L’action se poursuivra certainement à grande échelle mercredi, en lien avec les mobilisations autour de la Journée internationale de la femme.

La riposte lève également la résistance politique sur d’autres questions. Le groupe antiraciste Marche des Solidarités a tweeté mardi : « Nous pouvons gagner, ensemble nous pouvons gagner contre ce gouvernement et toute sa logique ! Ni la réforme des retraites, ni la loi anti-migrants Darmanin, ni la loi anti-squat. Contre Macron et son monde – solidarité, liberté, égalité, plein droit pour tous.

Lorsque les travailleurs se réunissent au niveau de la base, ils ne parlent pas seulement des pensions, mais de la rémunération et de la fin des contrats précaires. Et puis il y a parfois des débats sur à quoi sert le travail et comment la production est effectuée, qui en profite et comment cela pourrait être écologiquement durable.

C’est un combat qui trouvera un écho bien plus large que la France. Et cela ne se terminera pas facilement par un accord discret entre patrons et travailleurs.

Les patrons et les politiciens français n’ont jamais pleinement mis en œuvre le virage néolibéral des années 1980. Ils ont déclenché des attaques conçues pour faire ce que Margaret Thatcher en Grande-Bretagne et Ronald Reagan aux États-Unis ont réalisé pour les patrons et les riches.

Les attaques répétées se sont heurtées à une sérieuse riposte, puis les gouvernements ont fait des compromis qui ne sont pas allés aussi loin qu’ils le souhaitaient. Depuis 2010, les dirigeants ont durci leur position car ils ont ressenti la pression de concourir. C’est encore plus fort maintenant dans un monde en crise et où les généraux réclament de l’argent pour des missiles et des bombes de plus en plus gros, pas des salaires et des pensions.

Macron est prêt à affronter et à gagner, à ne pas se souvenir d’un autre compromis désordonné. Mais les travailleurs n’abandonneront pas facilement. La poursuite des grèves est cruciale, et cela est indissociable de l’organisation à la base.

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