a crowd shot of people cheering as they hear the exit poll result in the French election

Elections françaises : les fascistes perdent dans les sondages, mais la lutte doit continuer

Des millions de personnes sont soulagées que le RN fasciste ne soit pas arrivé en tête du scrutin, mais il a tout de même doublé son nombre de sièges

une photo de la foule qui applaudit en entendant le résultat du sondage de sortie des urnes lors des élections françaises

Les Français qui s'étaient rassemblés avec anxiété pour connaître les résultats des élections générales ont réagi avec soulagement et joie dimanche soir.

Les sondages de sortie des urnes ont dissipé la crainte que le parti fasciste du Rassemblement national (RN) puisse obtenir la majorité au Parlement et que son leader Jordan Bardella puisse devenir Premier ministre.

Au contraire, les sondages de sortie des urnes ont montré que le bloc du Nouveau Front populaire (NPF) remporterait le plus de sièges, entre 172 et 192. Le NPF regroupe le parti LFI de Jean-Luc Mélenchon, les Verts, le Parti communiste et le Parti socialiste de type travailliste.

Les sondages prédisaient que les députés associés au président néolibéral Emmanuel Macron auraient entre 150 et 170 sièges. Et les fascistes seraient troisièmes avec 150 à 170 sièges.

De tels résultats seraient un coup dur pour le RN qui a flairé l'opportunité de prendre le pouvoir et de durcir encore davantage un appareil d'État déjà autoritaire. Ils auraient fait de la vie des musulmans, des migrants et de tous les noirs un enfer.

Il n'est pas étonnant que les résultats des sondages aient suscité des acclamations. Ils ont montré que la plupart des gens ne voulaient pas que le RN dirige la société. Et le facteur le plus puissant pour contenir les fascistes a été les 800 000 personnes qui sont descendues dans la rue le mois dernier et ont ensuite fait campagne contre eux.

Mais ces votes ne vont pas arrêter la montée du fascisme. Il s'agit d'un nombre record de députés pour le RN. Et, en retirant ses candidats pour permettre aux partisans de Macron de gagner de nombreux sièges, le NPF a anéanti toute possibilité de mettre en œuvre une véritable politique de gauche.

Le NPF a encouragé les électeurs macronistes les plus révoltés, parmi lesquels le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin, architecte de la répression raciste, et l’ancienne Première ministre Élisabeth Borne, instigatrice des attaques contre les retraites.

Darmanin et Borne ont gagné, mais Philippe Poutou, du parti révolutionnaire NPA, qui avait rejoint le NPF, a perdu.

Darmanin a immédiatement appelé à un gouvernement national sans radicaux. « Aujourd'hui, personne ne peut dire qu'il a gagné ces législatives. Et surtout pas M. Mélenchon qui a montré beaucoup de prétention il y a quelques instants à la télévision », a-t-il déclaré.

« Il y a une volonté de changement de la part des électeurs. Je constate que la droite républicaine reste très forte. Il faudrait peut-être s’ouvrir un peu plus à cette droite républicaine. »

Le NPF a créé une autre version du « Front républicain » des principaux partis qui s’est avéré si inefficace (voir ci-dessous)

Les résultats sont susceptibles de voir un Premier ministre de gauche modérée, mais seulement un qui Macron et ses complices acceptent. Au sein du NPF, le Parti socialiste, très mainstream, devrait remporter presque autant de sièges que LFI. Le NPF a fait office de tente à oxygène pour ressusciter le PS qui semblait mort et enterré.

Quelles leçons pouvons-nous tirer du Front populaire contre le fascisme dans la France des années 1930 ?

Mais c’est précisément la politique du Parti socialiste et de ses partisans qui a ouvert la voie à la montée inexorable des fascistes.

Et un gouvernement mettant en œuvre des politiques favorables aux entreprises permettra aux fascistes de dire qu’ils défendent les gens ordinaires contre les élites unies.

Le groupe antiraciste Marche des Solidarités avait raison de dire que « c’est dans nos quartiers, nos lieux de travail, dans la rue que nous sommes les plus forts, dans notre solidarité et notre unité ».

Elle poursuit sa manifestation de masse contre le racisme et le colonialisme dimanche prochain, le jour de la Fête nationale.


Victoire du candidat Kanaky

Depuis des mois, des manifestations, des grèves et des émeutes ont lieu dans la possession coloniale française de Kanaky (Nouvelle-Calédonie), dans le Pacifique.

Cette fois, aux élections, un candidat autochtone kanak indépendantiste a remporté un siège au parlement français, battant un candidat pro-français au second tour.

Emmanuel Tjibaou est le premier candidat indépendantiste à remporter un siège à l'Assemblée nationale depuis 1986.


Qu’est-ce qui se cache derrière la montée des fascistes ?

Quatre facteurs principaux ont alimenté la montée des fascistes en France. Ce sont là les questions les plus urgentes.

Les principaux partis de gauche et de droite au pouvoir ont réagi au racisme des fascistes en faisant passer des lois racistes, anti-migrants et islamophobes. Loin d’étouffer la montée des fascistes, ces lois les ont encouragés et ont semblé légitimer leur politique.

  • La gauche dominante a fait valoir la nécessité de soutenir les candidats de droite et néolibéraux contre les fascistes. Loin de constituer un rempart contre le fascisme, les politiques d’austérité qui ont suivi ont renforcé le soutien aux fascistes.
  • La gauche et les dirigeants syndicaux n'ont pas réussi à créer un front uni efficace contre le fascisme lorsque le FN était encore petit. Et beaucoup ont refusé de qualifier le FN de fasciste.
  • L’absence d’une gauche suffisamment combative n’a pas permis de créer une alternative pour les travailleurs et les petits entrepreneurs qui sont profondément en colère contre les difficultés et les inégalités. En conséquence, une partie de cette colère s’est dirigée vers les fascistes.

Une brève histoire des fascistes en France

1972 : Jean-Marie Le Pen, ancien soldat et tortionnaire des résistants anticoloniaux algériens, fonde le Front national (FN). Des vétérans de la guerre d'Algérie et des collaborateurs nazis de la Seconde Guerre mondiale rejoignent Le Pen.

1986 : Le FN remporte ses premiers sièges à l'Assemblée nationale, dont Le Pen lui-même.

1987 : Le Pen décrit l’Holocauste comme un « simple détail de l’Histoire ».

1988 : Marine Le Pen recueille 14,4% des voix à l'élection présidentielle. En plus de ses attaques racistes, anti-migrants, antisémites et homophobes habituelles, le FN s'en prend à l'islam et aux immigrés musulmans.

2002 : Le Pen se présente à l'élection présidentielle et remporte 17% des voix, ce qui lui permet de se qualifier pour le second tour face à Jacques Chirac, candidat de droite. Des hommes politiques de droite et de gauche se sont rassemblés pour soutenir Chirac, affirmant que cela constituerait une barrière efficace contre la montée du fascisme. Chirac gagne, les fascistes progressent.

2012 : Marine Le Pen, fille de Jean-Marie, se présente à l'élection présidentielle et recueille 18 % des voix.

2014 : Le FN remporte le contrôle de 11 communes et la première place aux élections du Parlement européen avec 25% des voix

2017 : Deux ans après avoir exclu son père du parti, Marine Le Pen se présente à nouveau à la présidentielle. Elle obtient 21 % des suffrages au premier tour mais perd face à Emmanuel Macron au second tour. Une grande partie de la gauche et de la droite s'unissent pour soutenir Macron, affirmant qu'il constituera un obstacle à la croissance du fascisme. Macron gagne, les fascistes grandissent.

2022 : Marine Le Pen, qui a changé le nom de son parti en Rassemblement national, monte à 23,2 % des voix au premier tour de l'élection présidentielle. Une grande partie de la gauche et de la droite s'unissent pour soutenir Macron, affirmant qu'il constituera un obstacle à la montée du fascisme. Macron gagne, les fascistes grandissent.

2022 : Le RN remporte 89 sièges au Parlement, une avancée considérable.

2024 : Aux élections européennes, le RN de Jordan Bardella arrive en tête avec 31,4 % des voix. Macron convoque des élections législatives anticipées. Il espère diviser la gauche et émerger comme le choix « raisonnable ». Mais au premier tour des élections, le 30 juin, le RN et ses alliés recueillent 33 % des voix. Ils menacent de remporter une majorité qui ferait de Bardella le Premier ministre.

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